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Football – L’interview sans filtre de Stefan Islic

Noël Le Graët, le président de la FFF, a annoncé cette semaine que le foot amateur risquait de ne pas reprendre pour cette saison. Stefan Islic, vous êtes le président du District Escaut, et représentez les clubs amateurs locaux. Que pensez-vous de cette déclaration ?

Elle arrive tardivement, dans un contexte très compliqué pour nos clubs aujourd’hui. Ils avaient besoin d’avoir une vision en fin d’année dernière. C’est enfin une bonne nouvelle, mais elle n’est ni assurée, ni validée. Lorsque Noël Le Graët s’est déplacé la semaine dernière à la Ligue des Hauts-de-France, on lui a posé la question. Il nous a répondu «réponse le 13 mars», et il se trouve que le 13 mars c’est l’Assemblée Générale élective de la FFF, il est en pleine campagne. On peut se satisfaire de cette réponse qui est en fait un secret de Polichinelle. Outre le fait que les joueurs, les licenciés, les dirigeants, les familles du football ne sont pas dupes, pour certains clubs, il y a des échéances d’aménagements, de structuration. Ca aurait eu du sens d’anticiper, comme nos voisins belges, par exemple.

En octobre 2020, justement, vous avez été l’un des premiers à arrêter les championnats dans le District Escaut, vous aviez à l’époque évoqué que c’était une question de santé. 5 mois après, qu’est ce qui a évolué, et avez-vous changé de position ?

Effectivement, j’avais pris à l’époque la décision, après concertation de mes techniciens et de ma commission médicale. J’ai demandé les délais de reprise, de réathlétisation des jeunes et des moins jeunes, ainsi que les conséquences physiques qui découlent de cette pandémie. Je le rappelle, on nous a élaboré une activité, mais sans contact, sans vestiaires aussi. En plein hiver on pouvait contracter d’autres virus, liés à des mesures sanitaires mises en place. Je ne les conteste pas. On avait pensé baisser le nombre d’équipes dans les groupes, pour “gagner” des journées, et ainsi repousser les échéances en cas de Covid persistante. Maintenant nous sommes déjà début mars, c’est fini, c’est terminé, il faut arrêter de supposer. Au District Escaut, on a sollicité les acteurs du football, ça représentait 1200 personnes, les joueurs et les arbitres étaient plutôt favorables à une reprise, les administratifs à une saison blanche.

Fin janvier, vous avez appelé a un boycott de la coupe de France, toujours par les clubs amateurs. Pourquoi une position aussi radicale ? Les clubs étaient ils prêts physiquement, logistiquement et financièrement à une reprise de coupe ?

Je suis toujours dans cet état d’esprit, de boycott de la coupe de France. Des clubs m’ont appelés, en me disant qu’ils n’avaient pas les moyens techniques de recevoir des matchs, à cause d’arrêtés municipaux. Jouer après 18 heures était aussi interdit. Je me dois avant tout de protéger mes équipes, en m’appuyant encore une fois, sur mes techniciens et ma commission médicale. C’était très compliqué physiquement. Après les avoir protégé, j’ai supporté avec mes élus, les clubs qui ont décidé d’y participer. C’était très compliqué. Devons nous jouer, par monts et par vaux ou pour une fameuse prime donnée en cas de victoire aux clubs ? Que vaut la vie d’un joueur sur 90 minutes ? Et quand vous êtes éliminés, c’est fini.
On voulait un geste fort. Le bon sens était de ne pas y participer. C’est la seule compétition où on réunit normalement les pros et les amateurs. On aurait eu le droit, nous, de faire des rencontres sportives, mais nos amis du handball, du volley, du basket non. Quel est la différence ? On préférait être solidaires. J’ai une pensée de solidarité également pour le monde de la culture qui ne peut pas se retrouver. Je rajoute qu’avec ce qu’il se passe, le club qui remportera la coupe, aura énormément de mal a fêter ça avec ces supporters, dans sa ville.

Vous côtoyez régulièrement des clubs, vous avez donc une vision globale de la situation. D’après vous des clubs risquent-ils d’avoir moins de licenciés dans les années à venir, ou voire même de fermer si la situation perdure ?

J’ai un visu des clubs oui, que je vais voir seul et sans filtre régulièrement. La situation est assez particulière. Dans le valenciennois la pratique dans les installations sportives ne sont pas autorisées. A Valenciennes la municipalité a pris un arrêté interdisant l’utilisation des enceintes sportives. Je ne discute pas ça. Ailleurs, Dans le douaisis, le cambrésis ou l’avesnois c’est possible.
Financièrement les clubs en majorité vont bien : les entrées sont gratuites en général, il n’y a pas de dépenses pour les arbitres, pas ou peu de charges, pour certains le chômage partiel vient pallier une perte de salaire. Les clubs se concentrent sur leurs projets.
J’ai demandé aux clubs de se diversifier, grâce au PEF (Plan d’Education Fédéral). On a 40 000 licenciés, mais on pense en perdre 5 000 – 6 000 cette saison. Principalement des jeunes. Il y a des alternatives comme le développement du foot en milieu scolaire. C’est un projet embryonnaire.

Vous êtes également le directeur commercial du VAFC. Pouvez vous dresser un bilan sur le plan sportif et financier du club actuellement ?

Au niveau de l’association VAFC, on a un vrai savoir-faire. Sébastien Dhollande, le nouveau président de l’asso est un entrepreneur, u nmeneur d’hommes, mais aussi et surtout un footballeur. C’est agréable… Nos jeunes issus de la formation et préformation réussissent, et sont même en équipe A. Les pros, menés par Olivier (Guégan) et son staff dynamique sont disponibles, pour les clubs amateurs ou nos partenaires. Sur le plan comptable, depuis 2 saisons les résultats sont plutôt probants, prenants. Les aléas peuvent faire basculer un match, comme des décisions arbitrales. Il y a un engouement, sur les réseaux sociaux, il y a des commentaires négatifs ou positifs. Mais le foot, c’est des ondes positives, on décompresse, même en pros. On veut la Ligue 1. Valenciennes est une ville de football, on a tous les ingrédients pour y arriver.

Les supporters et groupes de supporters ont hâte de retrouver les tribunes françaises, et donc celles du Stade du Hainaut. C’est une privation qui est assez dure pour certains, avez-vous réfléchi à des mesures sanitaires, qui pourraient être testées à Valenciennes ou avez-vous des idées qui pourraient être appliquées au niveau local et national ?

C’est pas mon métier (rires). On a mis en place ce qui devait l’être et suivi à la lettre le protocole. Les groupes de supporters ont fait le boulot, quand on a pu revenir au stade à l’été. Il reste 5 matchs à domicile, je ne vois pas comment on arrivera à faire revenir nos supporters en tribune avant la fin de saison. Mais on peut aller dans les centres commerciaux. Alors pourquoi ne pas faire pareil dans un stade ? C’est comme ça, on ne peut rien y faire.
Lors de matchs à domicile, nous avons entendu des fans sur le parvis du Stade du Hainaut. Ca nous a touché, vraiment, nous les dirigeants, les joueurs, le président. On souhaite un rapide retour des nos supporters, et les passionnés. Le supporterisme au VAFC c’est réellement le 12ème homme. J’ai pu rencontrer certains leaders de sections, j’ai découvert une nouvelle famille du football.

Justement, la question du remboursement des abonnements de la saison dernière ou de ceux de cette année est elle encore sur le tapis, et le club a-t-il une solution ?

La direction du club, est toujours sur le sujet. De quoi parle-t-on ? On a proposé une ristourne, un don au club, ou un remboursement au prorata du nombre de matchs joués. On a reçu les engagements des uns et des autres. Eddy Zdziech a envisagé des solutions envers les supporters, on n’a pas eu le temps. On fera ce qu’il y a à faire, au cas par cas si il le faut. Le contexte nous en empêche pour le moment.

Les couacs à répétition et le retrait de Médiapro des retransmissions télévisées des matchs pro ont impactés tout le football français. Quelle est votre vision de cet échec, que de nombreux spécialistes avaient annoncés ? Y a t-il des enseignements à tirer ?

Oui. J’étais à Paris le 12 décembre 2019, quand Roures est arrivé avec sa courre, pour nous présenter l’arrivée de Téléfoot et Médiapro. Je découvrais. Je me dis à un moment, qu’il n’y a aucune garantie bancaires sur les sommes annoncées. Je ne voyais pas ça d’un mauvais œil, mais je n’étais pas inquiet non plus. J’étais plutôt dubitatif. Quelques mois plus tard, il est arrivé ce qui est arrivé, l’histoire on la connait.
Heureusement, au VAFC on a plusieurs cordes à notre arc, et à l’inverse d’autres clubs, nous n’avons pas licencié. Cette affaire vient entacher le football français. C’est un échec cuisant. La DNCG a joué d’une certaine souplesse.

Merci Stefan pour cette interview, vous voulez rajouter un dernier mot ?

On a un projet innovant au District Escaut de délocalisation. Le 10 mars on voit la CAPH sur un éventuel déménagement sur plusieurs sites potentiels. Il faut encore qu’on chiffre. J’espère y être en 2024, voire même avant. Les formations se feraient là bas. L’environnement touristique et historique y est parfait. On pourrait y faire des réunions de travail avec des entreprises. C’est novateur, on va y mélanger la culture, le sport, le travail.

Il y a une phrase que j’adore dire, mais elle résume tout. Je n’ai qu’une vie pour plusieurs envies. On rencontre de belles personnes dans le milieu, je suis accessible et simple. Il m’arrive de me tromper. J’essaye d’avoir une ouverture d’esprit sans avoir une fracture du crane. Donner plus à l’autre qu’à soi même c’est mon combat, dans le foot comme dans la vie.

Florian Bigotte

Responsable de Scaldis.fr

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